Habiter la ville

Quelle est une ville idéale en 2020 ?

Cette question est au cœur de la création d’Habiliv depuis 2018. Comment aider les franciliens à trouver la ville idéale, enfin plutôt leur ville idéale ? Car une fois les besoins essentiels de sécurité remplis, il n’existe pas de ville idéale mais des villes idéales..

Par Claire Billon, le 07/10/2020

Domaine départemental de Sceaux

Pourrait-il alors y avoir une ville idéale pour les familles, une autre pour les parents en solo, une autre pour les célibataires ? Difficile de généraliser : on peut avoir des enfants et ne pas souhaiter à tout prix s’expatrier à 1h de train de Paris pour se rapprocher de mère nature. On a donc décidé de se placer plutôt du point de vue de la ville en tâchant de dessiner un portrait des villes type en Île-de-France. A vous ensuite de « swiper » à droite ou à gauche.

La ville « village »

Centre-ville de Viroflay

La ville-village est une petite commune qui a tout ce qui est nécessaire, ni plus ni moins : son café sur la place du marché, sa jolie église, ses commerçants (son caviste, fleuriste, libraire…). Les habitants y louent l’esprit village car ils apprécient le fait de retrouver toujours les mêmes têtes au marché du samedi matin. Coté culture, la médiathèque et le conservatoire, pilliers centraux de la vie de quartier, concentrent l'essentiel des animations culturelles et artistiques de la ville.

Exemples : Viroflay, Rueil-Malmaison, Malakoff, La Garenne-Colombes

La ville « 21ème arrondissement de Paris »

Arrêt Mairie de Montrouge, le terminus de la ligne 4 qui permet très facilement de rejoindre le coeur de Paris.

On passe de Paris à la ville « 21ème arrondissement » presque sans s’en rendre compte. On y retrouve les charmes de la capitale, son métro et ses velibs. On les choisit d’abord pour leur prix au m2 plus abordable et on finit par se dire que ces villes n’ont rien à envier à Paris. Enfin c'est Paris quoi! Elles manqueront peut-être encore de commerces de bouche ou de magasins un peu branchés pour séduire les vrais parigos mais côté culture elles seront quasiment toutes dotées d’un théâtre, comme le théâtre du Garde-Chasse aux Lilas ou le Beffroi de Montrouge.

Exemples : Les Lilas, Montrouge, 

La ville « comme à la campagne »

Chaville avec la forêt de Fausses Reposes en fond

Certainement la raison majeure (en dehors du prix au m2) de vouloir quitter Paris : être plus proche de la nature. Si certaines villes ont même une forêt en leur cœur (forêt de Meudon, Forêt de Fausses Reposes proche de Chaville, Viroflay et Sèvres, la Forêt Domaniale de Malmaison), d’autres sont enveloppées par les champs comme Claye-Souilly. On pourra même aller à la ferme (ferme pédagogique de la Prée à Claye-Souilly) et faire du Poney (au Poney Club de Rueil-Malmaison). Dans une moindre mesure, la coulée verte, qui traverse de nombreuses villes franciliennes, donne des airs de campagne et offre de jolies balades en vélo de Malakoff à Massy en passant par Bagneux, Fontenay-aux-Roses, Sceaux, Châtenay-Malabry, Antony. Sans oublier que ces îlots de fraîcheur salvateurs contribuent aussi à diminuer le ressenti du réchauffement climatique.

Exemples : Chaville, Meudon, Rueil-Malmaison, Claye-Souilly, Saint-Cloud, Clamart, Châtenay-Malabry, Suresnes, Sèvres, Fontenay-aux-Roses

La ville « comme à la mer »

Quai de Latois, en face de l'Île des Loups à Nogent-sur-Marne

Que vous soyez plutôt bords de Marne, canal de l’Ourcq ou bords de Seine, l’Île-de-France regorge de villes offrant un cadre de vie presque balnéaire. Non seulement cela peut être salutaire en cas de canicules, mais, à bord d’un canoë, debout sur un paddle sur le canal de l’Ourcq ou lors d’une vraie initiation paddle aux Terrasses de la Marne à Nogent-sur-Marne, vos weekends ressembleront de plus en plus à vos vacances. Ceux qui ne sont pas particulièrement sportifs préfèreront Champigny plage et ses guinguettes, l’Été du Canal à Bondy, ou une partie de pêche au Lac de Vaires-sur-Marne à Chelles.

Exemples : Pantin, Bobigny, Bondy, Nogent-sur-Marne, Champigny-sur-Marne, ChellesColombes, Issy-les-Moulineaux, Asnières-sur-Seine

La ville « arty »

Le Centre National de la Danse à Pantin

Comme son nom l’indique, elle a attiré une population d’artistes et d’artisans, la « classe créative », contribuant ainsi à la première étape de gentrification et de mutation de ces villes au passé industriel. Encouragés par des politiques culturelles actives, des lieux culturels plus ou moins académiques pullulent, avec pour la plupart un rayonnement qui dépasse largement la ville et attire les foules de la capitale : Le CND, La Dynamo, les Magasins Généraux de Pantin, Mains d’Œuvres, 1789, Commune Image de Saint-Ouen, le MAC Val, le Kilowatt de Vitry en sont les meilleurs exemples.

Il y règne aussi une certaine liberté, un certain « bordel » qui les empêche de devenir des villes « chiantes » comme l’agence d’urbanisme Deux Degrés pose l’hypothèse dans son livre Le Petit Paris : « Est-ce que ce bordel n’est pas constitutif d’une culture urbaine ? » Il n’est pas rare en effet de voir le canal de l’Ourcq se transformer en barbeuc et apéro géant avec concours de plongeons à chaque pont. À fortiori certaines villes ont développé une personnalité si forte, comme Montreuil ou Saint-Denis, qu’elles ne sont plus simplement villes périphériques à Paris mais des villes avec leur propre force de gravité en Île-de-France.

Exemple : Pantin, Saint-Ouen-sur-Seine, Vitry-sur-Seine, Saint-Denis, Montreuil.

La ville « esthète »

Place Winston Churchill à Neuilly-sur-Seine

Ces villes arborent une beauté formelle avec immeubles haussmanniens, hôtels particuliers, et maisons avec jardin faisant de la concurrence aux beaux quartiers de Paris. Mais les prix de l’immobilier imitent aussi ceux de Paris ! Comptez par exemple 10 400 au m2 à Neuilly-sur-Seine. La culture, bien présente dans ces villes, y est empreinte d’un certain formalisme académique comme au théâtre de la Garenne-Colombes ou au théâtre des Sablons à Neuilly-sur-Seine où on trouvera une programmation qui oscillera surtout entre concerto, symphonies, danse contemporaine, ballet et jazz.

Exemple : Neuilly-sur-Seine, Puteaux, La Garenne Colombes.

La ville « de demain » ou ville « durable »

Écoquartier Fort d'Issy à Issy-les-Moulineaux

On le sait, la ville, qui accueille 77% de la population française et recouvre plus de 20% du territoire, concentre une grande partie des problématiques environnementales : artificialisation des sols, faible résilience au réchauffement climatique avec ces îlots de chaleur provoquant un différentiel allant jusqu’à 10 degrés par rapport aux zones rurales, étalement urbain avec comme corollaire une forte dépendance à la voiture, régression de l’agriculture aux portes de la ville…

Pourtant c’est dans ces même villes que réside l’espoir d’un monde durable. Les écoquartiers se multiplient à l’instar d’Issy-les-Moulineaux qui en compte 3 ou l’Ile-de-la-Marne à Noisy-le-Grand, l’un des plus grands écoquartiers d’île-de-France. Alors que l’agriculture (péri)urbaine et l’essor des circuits courts est devenue un outil déterminant pour une ville durable, des projets de fermes urbaines émergent comme ceux des Fermes de Gally à Saint-Denis, Sartrouville, Saint-Cyr et bientôt dans l’Essonne. Coté vélo, transport low tech et zéro carbone par excellence, la région s’est doté d’un Plan Vélo. Même si les aménagments sont encore trop limités et que le nombre de km n'est pas le seul critère, Saint-Germain, Antony, Rueil-Malmaison, Clamart comptent le plus de km de voies cyclables (données OpenStreetMap), sûrement bientôt renforcées par le projet de RER V porté le collectif vélo Ile-de-France.

Exemple : Écoquartiers d’Issy-les-Moulineaux et de Noisy-le-Grand, ferme urbaine Zone Sensible à Saint-Denis.

Conclusion, tout comme en matière de « matching » amoureux, la ville idéale pour certains est une ville détestable pour d’autres. Attention donc à ce que cet « idéal » auquel aspirent les urbanistes ne devienne pas un dogme qui standardise à outrance la ville au point de retirer tout ce qui fait son jus, voir exclut certaines populations malgré les promesses « d’inclusivité ».

« Ce qui nous amène à nous demander si une planète couverte d’écoquartiers ce n’est pas la perspective d’un monde sous Prozac.» - Deux Degrés, le Petit Paris-.

 

Par Claire Billon, le 07/10/2020

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